DéFormater !

La newsletter qui explore les formes de narration. Je n’aime pas les textes formatés par les algorithmes. Je converse ici avec les vraies gens qui racontent des histoires. Avec l'Intelligence humaine.

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Par Valérie Van Oost
1 oct. · 4 mn à lire
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Quel lien entre un stylo et un gant de boxe ?

Au programme : une conversation punchy pour monter sur le ring et boxer avec les mots.

Bonjour,

Préparez-vous à entrer dans la bagarre pour cette nouvelle édition de DéFormater ! On parle de boxe et d’écriture, de laisser s’exprimer le corps plutôt que le mental. Prêt à monter sur le ring ?

LA CONVERSATION

L’écriture est un sport de combat 

J’ai rencontré Emmanuelle Jay, spécialiste de l’écriture créative, en fréquentant ses ateliers Boxe et Écriture. Direct, j’ai aimé ses sessions co-animées avec Rodolphe Lanfranchi, coach de boxe. D’abord, parce qu’elles ouvrent des perspectives sur une autre façon d’écrire, mettant le corps en mouvement et le mental K.O. Ensuite, parce que j’adore cette danse d’attaque et de défense et aussi (attention spoiler alert ou red flag, prenez-le comme vous voulez) balancer une droite.

Se mettre en mouvement pour libérer la créativité, faire surgir les idées est souvent nécessaire aux auteurs. Ma voisine scénariste part chaque jour marcher (👋Aude). L’écrivaine et poétesse Cécile Coulon puise son inspiration dans une course à pied matinale. Sans oublier Haruki Murakami dont on ne peut que conseiller la lecture d’Autoportrait de l’auteur en coureur de fond.

Mais, franchement, mettre des gants pour écrire, peut paraître surprenant ! Comment, Emmanuelle, cette idée est-elle née ?

Une sorte d’évidence qui s’est imposée un jour, parce que tous les feux étaient au vert. Cette évidence vient bien sûr de ma double pratique artistique et sportive : animatrice d’atelier d’écriture créative et boxeuse en loisir depuis une dizaine d’années. Mais, cela n’explique pas tout. J’ai toujours considéré l’écriture comme une activité corporelle et, dans ma propre pratique, j’ai toujours cherché à écrire à partir du corps, dans son prolongement, qu’il s’agisse de l’exploration artistique par les mots des cinq sens ou de l’expression singulière d’un rapport sensuel au monde. J’ai toujours ressenti les émotions et les sensations physiques d’une manière très intense. Le défi de leur mise en mots, de manière littéraire ou poétique, nous oblige à nous montrer créatifs pour trouver une image qui dira la singularité de notre ressenti.
J’ai imaginé le premier atelier Boxe et Écriture dans le cadre d’un partenariat avec Le Labo des histoiresUne expérience très intéressante ! Puis, j’ai proposé à mon coach de boxe, Rodolphe Lanfranchi, d’imaginer une suite à donner à ces ateliers avec moi. Rodolphe était aussi sensible à la question des dialogues corporels qui se jouent dans la boxe avec un intérêt pour la créativité en mouvement. Il connaissait très bien le chessboxing dont nous nous sommes inspirés.

Le chessboxing est une invention d’Enki Bilal dans sa BD Froid Equateur… 

Oui, il a imaginé une performance combinée de jeu d’échecs et de boxe sur un ring. Des gens s’en sont emparés et ont créé la fédération de chessboxing. 11 rounds qui alternent parties rapides et combats jusqu’à ce qu’il y ait échec et mat ou K.O.

Quel est le lien entre mouvement et écriture ? 

Le mouvement m’évoque beaucoup de choses. Le mouvement physiologique, l’origine du mot émotions (« mettre en mouvement »), la pensée en mouvement, le geste de l’écriture… Le mouvement favorise le cours de la pensée et la transmission du savoir. Comme le montre la très ancienne habitude de déambuler tout en parlant. Le mouvement du corps stimule le travail mental. De nombreux écrivains ont parlé de leur rapport à la marche ou à la montagne. Freud ou Françoise Dolto faisaient aussi des promenades. Erri de Luca a écrit sur les sommets, le rythme des corps, les ascensions...

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