Discours politique : le masque et la plume

Au programme : une conversation sur l'écriture politique et un coup d'oeil sur la vie fantastique de Wes Anderson.

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5 min ⋅ 01/04/2025

Bonjour,
Bienvenue dans cette Ă©dition garantie sans 🐟 et aux nouveaux abonnĂ©s. Ici, on part Ă  la rencontre de ceux qui Ă©crivent et racontent des histoires. Parce que les mots ont un pouvoir, j’avais envie, ce mois-ci, d’en savoir plus sur la façon dont le pouvoir les utilise.

LA CONVERSATION

Le poids des plumes

Dans l'ombre des prises de parole des politiques, il y a des plumes. ChloĂ© Perrot, ancienne chargĂ©e de mission Culture Ă  l’ÉlysĂ©e, sous Nicolas Sarkozy, et collaboratrice parlementaire de Franck Riester, nous plonge dans les coulisses de l’écriture politique.

Comment s’organisait ton travail ?
À l'ÉlysĂ©e et dans les cabinets ministĂ©riels, il y a des plumes qui sont uniquement chargĂ©es d'Ă©crire. Pour ma part, en tant que chargĂ©e de mission, je participais Ă  la rĂ©flexion sur les politiques publiques culturelles et j’avais des tĂąches d'Ă©criture pour les prises de parole du prĂ©sident. Écrire des discours, des Ă©lĂ©ments de langages quand le prĂ©sident rencontre des personnalitĂ©s du monde culturel, des courriers, des hommages pour les dĂ©cĂšs de personnalitĂ©s


Tu avais des nécrologies déjà rédigées, comme dans la presse ?
Au ministĂšre de la Culture, il existe ce type de document. Mais pas Ă  l’ÉlysĂ©e. Quand quelqu'un dĂ©cĂšde, il faut d’abord dĂ©cider si le prĂ©sident va rĂ©agir ou pas, puis suivre un ordre protocolaire : le prĂ©sident rĂ©agit, puis le Premier ministre et, enfin, les ministres. Si on est occupĂ© Ă  autre chose, les Ă©quipes du Premier ministre nous pressent pour pouvoir rĂ©agir Ă  leur tour !

Comment les plumes travaillent-elles les discours ?
La prise de parole est omniprĂ©sente en politique. Il existe plusieurs niveaux de plume. Tu peux ĂȘtre une plume et rĂ©diger les remises de dĂ©corations, c'est moins stratĂ©gique Ă©videmment !
C'est un truc qui s’apprend sur le tas. On n’a pas de formation. À Sciences Po, on n’apprend pas Ă  Ă©crire un discours. Mais, il y a des Ă©coles diffĂ©rentes. Selon les personnes qui Ă©crivent. Par exemple, j’avais travaillĂ© sur un discours pour Nicolas Sarkozy Ă  l’occasion du 600e anniversaire de la naissance de Jeanne d'Arc. L’objectif Ă©tait d'expliquer que Jeanne d'Arc n'Ă©tait pas une figure d'extrĂȘme droite et pouvait parler Ă  tous les Français. J’apportais des Ă©lĂ©ments et le discours Ă©tait co-rĂ©digĂ© par Henri Guaino et mon chef, Olivier Henrard, le conseiller Culture. Avec Henri Guaino, on Ă©tait dans la narration, on vivait la bataille avec Jeanne d'Arc, on pouvait entendre les flĂšches qui sifflaient dans tous les sens. Olivier Henrard Ă©tait beaucoup plus rationnel et analytique : l'histoire, la mĂ©moire, le patrimoine, les leçons Ă  tirer et ce qu'on met en place dans notre politique culturelle
 Cela m'avait surpris parce qu’ils avaient deux approches trĂšs diffĂ©rentes pour la prise de parole d’une mĂȘme personne. 
Et puis, il y a des écoles selon les commanditaires et leurs exigences. Par exemple, Nicolas Sarkozy ne voulait pas de citation.

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Par Valérie Van Oost

Je ne peux pas m’empĂȘcher de faire des interviews (j’ai un passif de journaliste). Je suis fascinĂ©e par les inventeurs d’histoires, les crĂ©ateurs de rĂ©cits (sous toutes les formes surtout celles que je ne sais pas fabriquer). Je sais Ă  quel point ce travail est exaltant et difficile (moment d’ego et d’auto-congratulation : j’écris aussi des romans). 

Bref, j’ai envie, avec cette newsletter, de partir Ă  la rencontre des artisans de la narration et de partager nos conversations. 

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