Au programme : une conversation sur l'écriture politique et un coup d'oeil sur la vie fantastique de Wes Anderson.
Bonjour,
Bienvenue dans cette Ă©dition garantie sans đ et aux nouveaux abonnĂ©s. Ici, on part Ă la rencontre de ceux qui Ă©crivent et racontent des histoires. Parce que les mots ont un pouvoir, jâavais envie, ce mois-ci, dâen savoir plus sur la façon dont le pouvoir les utilise.
Dans l'ombre des prises de parole des politiques, il y a des plumes. ChloĂ© Perrot, ancienne chargĂ©e de mission Culture Ă lâĂlysĂ©e, sous Nicolas Sarkozy, et collaboratrice parlementaire de Franck Riester, nous plonge dans les coulisses de lâĂ©criture politique.
Comment sâorganisait ton travail ?
Ă l'ĂlysĂ©e et dans les cabinets ministĂ©riels, il y a des plumes qui sont uniquement chargĂ©es d'Ă©crire. Pour ma part, en tant que chargĂ©e de mission, je participais Ă la rĂ©flexion sur les politiques publiques culturelles et jâavais des tĂąches d'Ă©criture pour les prises de parole du prĂ©sident. Ăcrire des discours, des Ă©lĂ©ments de langages quand le prĂ©sident rencontre des personnalitĂ©s du monde culturel, des courriers, des hommages pour les dĂ©cĂšs de personnalitĂ©sâŠ
Tu avais des nécrologies déjà rédigées, comme dans la presse ?
Au ministĂšre de la Culture, il existe ce type de document. Mais pas Ă lâĂlysĂ©e. Quand quelqu'un dĂ©cĂšde, il faut dâabord dĂ©cider si le prĂ©sident va rĂ©agir ou pas, puis suivre un ordre protocolaire : le prĂ©sident rĂ©agit, puis le Premier ministre et, enfin, les ministres. Si on est occupĂ© Ă autre chose, les Ă©quipes du Premier ministre nous pressent pour pouvoir rĂ©agir Ă leur tour !
Comment les plumes travaillent-elles les discours ?
La prise de parole est omniprĂ©sente en politique. Il existe plusieurs niveaux de plume. Tu peux ĂȘtre une plume et rĂ©diger les remises de dĂ©corations, c'est moins stratĂ©gique Ă©videmment !
C'est un truc qui sâapprend sur le tas. On nâa pas de formation. Ă Sciences Po, on nâapprend pas Ă Ă©crire un discours. Mais, il y a des Ă©coles diffĂ©rentes. Selon les personnes qui Ă©crivent. Par exemple, jâavais travaillĂ© sur un discours pour Nicolas Sarkozy Ă lâoccasion du 600e anniversaire de la naissance de Jeanne d'Arc. Lâobjectif Ă©tait d'expliquer que Jeanne d'Arc n'Ă©tait pas une figure d'extrĂȘme droite et pouvait parler Ă tous les Français. Jâapportais des Ă©lĂ©ments et le discours Ă©tait co-rĂ©digĂ© par Henri Guaino et mon chef, Olivier Henrard, le conseiller Culture. Avec Henri Guaino, on Ă©tait dans la narration, on vivait la bataille avec Jeanne d'Arc, on pouvait entendre les flĂšches qui sifflaient dans tous les sens. Olivier Henrard Ă©tait beaucoup plus rationnel et analytique : l'histoire, la mĂ©moire, le patrimoine, les leçons Ă tirer et ce qu'on met en place dans notre politique culturelle⊠Cela m'avait surpris parce quâils avaient deux approches trĂšs diffĂ©rentes pour la prise de parole dâune mĂȘme personne.
Et puis, il y a des écoles selon les commanditaires et leurs exigences. Par exemple, Nicolas Sarkozy ne voulait pas de citation.
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