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Par Valérie Van Oost
2 juil. · 6 mn à lire
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Comment un scénario de série devient un roman-feuilleton ?

Au programme : Comment un scénario se transforme en objet littéraire ? Une politique-fiction pour le 2e tour ?

Bonjour,

Bienvenue dans cette édition où il est question d’un format littéraire oublié, d’un genre nouveau et d’une démarche créative particulière.

LA CONVERSATION

La vie secrète d’un objet littéraire 

C’est l’histoire d’un projet de série télé, une biographie classique qui mue en biopic fantasy, avant de se métamorphoser en roman-feuilleton illustré à la mode du XIXe siècle. Imprégnée de toutes ces transformations, l’écriture de La vie secrète de Sarah Bernhardt, signé Gilles Verdiani, est en soi une aventure singulière. J’ai eu envie de savoir comment ce scénariste a transformé un projet pensé pour le petit écran en objet littéraire aussi désuet que novateur.

Au début était Sarah Bernhardt, la Divine… et le café de la place du Châtelet.

La journaliste et essayiste Lauren Malka voulait travailler avec moi et on cherchait un sujet pour écrire un scénario ensemble. Nous étions, par hasard, dans la brasserie Le Sarah Bernhardt. J’avais découvert quelques mois auparavant l’histoire de cette actrice et j’avais été impressionné. Elle n’a pas été qu’une grande actrice. Il n’y a pas une étape de son parcours qui ne soit pas passionnante. Elle a claqué la porte de la comédie française, elle a créé sa troupe et est devenue sa propre patronne. Elle est morte trois fois, a survécu trois fois. Il y a la politique, les rapports avec son fils, sa mère, à l’argent - milliardaire, ruinée, avant de se refaire -, ses amours... Il n’y a pas un homme célèbre de l’époque avec qui elle n’ait pas couché ou supposé avoir couché. Elle a aussi été sculptrice… Tous les aspects de sa vie sont romanesques. Lauren a été enthousiasmée comme moi. Nous avions notre sujet. 

Vous êtes partis tout de suite sur une idée de série plutôt que de film ?

Sa vie est passionnante de sa naissance à sa mort. À ce moment-là, je regardais beaucoup The Crown. C’est, à mes yeux, un modèle de la série biographique. Toute la vie d’Elizabeth II y est racontée, par grandes périodes et à travers des personnages très forts. Nous avons donc pensé d’abord à adopter le même format pour Sarah Bernhardt. Dans une série, on pouvait à la fois raconter ce qu’elle a traversé, que ce soit politique, artistique et amoureux, mais aussi donner de la place aux personnages célèbres ou moins célèbres qui ont marqué sa vie, et brosser un large tableau des époques qu’elle a traversées, du Second Empire aux années 1920. J’étais aussi beaucoup imprégné du Jeu de la dame, une série qui se présente comme une biographie, bien que le personnage soit fictif, avec une trajectoire vers l’excellence et le succès malgré les obstacles internes et externes, qui ressemble à celle de Sarah Bernhardt.

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